[28/08/2009] La reconquête éclair des ammonites après la plus grande extinction de tous les temps

Après la crise d'extinction permo-triassique(1), il y a 252,6 millions d'années, les ammonites se sont diversifiées et ont reconquit les écosystèmes 10 à 30 fois plus rapidement que ce qu'on estimait jusqu'à présent. Cette découverte est le fruit d'une collaboration franco-suisse impliquant les laboratoires Biogéosciences (Université de Bourgogne / CNRS), Paléoenvironnements & Paléobiosphère (Université Claude Bernard Lyon 1 / CNRS) et les Universités de Zurich et Lausanne (Suisse). Ces résultats remettent profondément en question la conception des paléontologues sur la dynamique de l'évolution des espèces et le fonctionnement de la biosphère après une crise d'extinction de masse. L'étude paraît le 28 août dans la revue Science.


L'histoire de la vie sur Terre est ponctuée par de nombreuses crises d'extinctions, brèves périodes de fortes diminutions de la biodiversité. Ces crises sont suivies par des phases où les espèces qui ont survécu reconquièrent la biosphère et se diversifient. Il y a 252,6 millions d'années, la crise permo-triassique, la plus violente à ce jour, décime plus de 90% des espèces alors existantes. Jusqu'à présent, les études ont montré que la biosphère avait mis entre 10 et 30 millions d'années pour recouvrer des niveaux de biodiversité comparables à ceux d'avant la crise.

Une équipe franco-suisse de paléontologues vient de montrer que les ammonites(2) n'ont eu besoin que d'un million d'années après la crise permo-triassique pour se diversifier à la même hauteur qu'auparavant. Abondants durant le Permien(1), ces mollusques céphalopodes(2) échappent de justesse à l'extinction totale lors de cette crise : seules deux ou trois espèces survivent mais il semble qu'une seule soit à l'origine de l'extraordinaire diversification du groupe après la crise. Il a fallu sept années d'acquisition de nouveaux fossiles et d'analyse de bases données existantes pour déterminer le rythme de la diversification des ammonites. Au total, 860 genres d'ammonites(3) répartis dans 77 régions du monde sont enregistrés pour 25 intervalles de temps successifs allant de la fin du Carbonifère à la fin du Trias, soit un peu plus de 100 millions d'années.

La découverte de cette reconquête " explosive " achevée en un million d'années donne une nouvelle orientation à un débat controversé. En effet, elle implique que les estimations proposées jusqu'alors pour la crise permo-triassique étaient basées sur des données tronquées ainsi que des datations imprécises, sinon inexactes. Par ailleurs, les durées de reconquêtes estimées pour d'autres crises d'extinction, pourtant moins fortes que celle concernée ici, varient toutes entre 5 et 15 millions d'années. Le résultat obtenu ici suggère que ces estimations pourraient également être revues à la baisse. Alors que la biosphère s'engage vraisemblablement dans sa sixième grande crise d'extinction, cette découverte rappelle paradoxalement que la reconquête de la biosphère par les espèces survivantes à une crise d'extinction est un processus très long, courant au minimum sur plusieurs dizaines de milliers de générations humaines.

  • Dates
    Paru le 2 septembre 2009
  • Type
    Communiqué de presse