Patrick Mehlen : Lauréat 2025 du Grand Prix de la Fondation pour la Recherche Médicale
Directeur du Centre de recherche en cancérologie de Lyon (CRCL – CNRS / INSERM / Centre Léon Bérard / Université Claude Bernard Lyon 1), Patrick Mehlen reçoit le Grand Prix 2025 de la Fondation pour la Recherche Médicale. Cette distinction salue sa contribution déterminante à la compréhension des « récepteurs à dépendance », dont la découverte ouvre aujourd’hui la voie à des approches thérapeutiques innovantes en cancérologie.
Patrick Mehlen Chaque année, grâce à la générosité de ses donateurs, la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM) distingue des scientifiques dont les travaux repoussent les frontières des connaissances en santé. Son Grand Prix, doté de 120 000 €, récompense une personnalité de renommée internationale pour une contribution majeure à la recherche médicale. En 2025, le jury du Comité de la recherche et du Conseil scientifique de la FRM a choisi d’honorer Patrick Mehlen pour ses travaux pionniers en cancérologie. Patrick Mehlen dirige le Centre de recherche en cancérologie de Lyon (CRCL - CNRS / INSERM / Centre Léon Bérard / Université Claude Bernard Lyon 1). Il y est responsable de l’équipe « Apoptose, cancer et développement ». Il dirige également Netris Pharma, une start-up de biotechnologies qu’il a contribué à créer.
Découverte des « récepteurs à dépendance » en 1998
Biologiste cellulaire de formation et ancien élève de l’École normale supérieure de Lyon, Patrick Mehlen a acquis une réputation scientifique internationale pour sa découverte en 1998, lors de son postdoctorat aux États-Unis, d’un nouveau type de récepteurs biologiques, baptisés « récepteurs à dépendance ». Situés à la surface des cellules, ils sont activés lorsque les protéines qui les reconnaissent spécifiquement – appelées ligands – s’y fixent ; ce qui déclenche un signal « positif » pour la cellule, comme la prolifération cellulaire. Mais ces récepteurs à dépendance sont aussi activés par l’absence de ligand, un concept alors inédit. Dans ce cas de figure, un signal « négatif » est transmis à la cellule, qui aboutit à sa mort. D’où le nom donné à ce type de récepteur : lorsqu’une cellule l’exprime, sa survie dépend de la présence de son ligand.
Après 1998 et la découverte de ce nouveau paradigme, Patrick Mehlen et son équipe identifient ou contribuent à identifier une vingtaine de récepteurs à dépendance, soit la plupart connus à ce jour. Ils s’attachent en parallèle à décortiquer les mécanismes moléculaires de mort cellulaire qu’ils induisent. Leurs avancées conduisent à l’hypothèse qu’avec leur double fonction, les récepteurs à dépendance sont impliqués dans divers processus : à la fois dans la formation du système nerveux durant le développement embryonnaire, mais aussi dans le cancer lorsque le mécanisme de mort cellulaire s’enraye.
Application en cancérologie
L’arrivée de son équipe au Centre de lutte contre le cancer Léon Bérard, à Lyon, incite le chercheur à orienter ses travaux sur les mécanismes du développement tumoral. L’équipe se focalise alors sur les récepteurs à dépendance dont le ligand est une protéine nommée Nétrine-1. Les chercheurs montrent que les cancers agressifs progressent en inhibant le signal de mort induit par ces récepteurs en l’absence de Nétrine-1. De fait, les tumeurs se mettent à produire elles-mêmes la Nétrine-1 dont ont besoin les cellules souches tumorales pour survivre et donner naissance à de nouvelles cellules tumorales.
Innovation thérapeutique
Cette découverte mène à la création d’une start-up, Netris Pharma, et au développement d’un anticorps capable de bloquer la liaison entre la Nétrine et ses récepteurs. Cette approche innovante réactive ainsi le signal de mort dans les cellules souches tumorales, particulièrement résistantes aux traitements existants et responsables des métastases. Cet anticorps est testé aujourd’hui dans plusieurs essais cliniques de phase 2 dans différents cancers (endomètre, col de l’utérus, pancréas, foie). Avec, d’ores et déjà, des résultats prometteurs en complément des traitements existants. Une magnifique illustration de l’indispensable continuum entre recherche fondamentale et recherche clinique pour dessiner des stratégies thérapeutiques innovantes.