Distinction / prix


Sylvain Dolédec, l’écologie des milieux dulcicoles à l’honneur

Sylvain Dolédec, Professeur à Lyon 1 et membre du Laboratoire d'Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés (LEHNA) est lauréat en 2022 du Grand Prix de la société française d’écologie.

Sa nomination et sa récompense soulignent l’importance de ses recherches en écologie des milieux dulcicoles (d’eau douce), son implication collective tant au niveau du LEHNA qu’à l’Université, et son impact majeur sur les méthodes statistiques utilisées aujourd’hui en écologie. Ses apports à l’étude des communautés écologiques via les analyses de données multivariées ont acquis une notoriété internationale qui bénéficie plus généralement à toute la communauté française des écologues.

Sylvain Dolédec a commencé ses études universitaires à l’Université Claude Bernard au tournant des années 80. Il y développe un intérêt pour l’étude des milieux aquatiques et de leurs communautés auprès d’enseignants-chercheurs comme M. Bournaud,  H. Tachet, et A.L. Roux. Il consacrera sa thèse aux peuplements de macroinvertébrés benthiques du cours inférieur de l'Ardèche, un groupe zoologique que l’on trouve dans tous les cours d’eau. En eau douce, il s’agit surtout de larves et adultes d’insectes aquatiques, mais aussi des crustacés et des mollusques. Pendant sa thèse, il s’intéresse à l’espèce Hydroscapha granulum - qui appartient à l’ordre des coléoptères - dans la rivière Ardèche. Il donnera une description morphologique et écologique de la larve alors que les ouvrages d’identification européens utilisaient la description de l’espèce nord-américaine.

Parallèlement, il commence à s’intéresser à des approches méthodologiques visant à optimiser l'interprétation mathématique et statistique des résultats écologiques. Approche qu’il approfondira tout au long de sa carrière. Nommé Maître de Conférence en 1990 à l’Université Lyon 1, il intègre le LEHNA où ses thématiques de recherche concernent l’élaboration des bases théoriques en écologie et le transfert de celles-ci vers la gestion des eaux courantes. Avec toujours un intérêt particulier pour les macroinvertébrés benthiques dulcicoles.

Ces organismes jouent un rôle clé dans le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Élément important de la chaîne alimentaire, ils constituent des sentinelles permettant d’évaluer l’état de santé des cours d’eau – ce qu’on appelle bioévaluation. Or, entre 1970 et 2018, les scientifiques enregistrent un déclin des espèces de poissons migrateurs de 76%, indiquant que l’habitat des cours d’eau se dégrade de manière accélérée, avec des conséquences sur les services écosystémiques rendus par les milieux aquatiques, mis à mal tant au niveau de la ressource qu’au niveau des processus (ex. dégradation de la matière organique).

Dans le cadre de ses recherches, Sylvain Dolédec a contribué à montrer que les réponses à l’environnement des traits biologiques (ex. taille, reproduction, dispersion, respiration) dans les assemblages aquatiques convergeaient à l’échelle régionale et continentale, et que la plupart des traits varient de manière prévisible. Des résultats qui peuvent faciliter des actions de gestion ciblées des milieux dulcicoles. Ayant un temps occupé le poste de chargé d’études au bureau du GREBE, il a échangé avec les 22 Services Régionaux d’Aménagement des Eaux (actuelle DREAL) sur leur pratique d’échantillonnage. Cette sensibilité pour la gestion des cours d’eau et les écosystèmes aquatiques, Sylvain Dolédec l’a intégrée à son travail de chercheur.

Il a notamment contribué à des développements méthodologiques pour mesurer l’efficacité écologique d’une réhabilitation, hiérarchiser l’effet des stress multiples et mesurer l’intégrité écologique d’un système. Une démarche qui autorise une application du diagnostic à large échelle telle que recommandée par l’Union Européenne, notamment à travers la Directive Cadre sur l’Eau.

En 2004, il est nommé Professeur sur un poste de Bioévaluation des écosystèmes aquatiques. Cette distinction souligne l’importance de ses recherches dans les milieux dulcicoles, alors que le changement climatique, qui agit sur le débit des cours d’eau et donc sur les habitats, les processus et la biodiversité, pourrait accélérer la dégradation des cours d’eau observée depuis plus d’un demi-siècle. Elle récompense également une entreprise collective, comme le souligne l’intéressé :

« Au cours de ma carrière, j’ai eu la chance de côtoyer des personnalités à la rigueur intellectuelle sans faille et qui ont donné une orientation unique à ma vie professionnelle. Je pense aussi aux étudiants que j’ai pu croiser à Lyon 1 ou ailleurs, et qui font le sel quotidien des enseignants-chercheurs. Ce prix couronne donc avant tout de belles rencontres humaines et un travail d’équipe ».
 



Laboratoire :

Laboratoire d'Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés (LEHNA - CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1/ENTPE)


 

Publié le 23 février 2023